
La vague mérite le détour.
Ce qui est fascinant, c'est la rapidité avec laquelle les jeunes se plient aux régles, d'abord par jeu. Puis le jeu devient amusant, les contraintes s'estompent au fur et à mesure que les régles sont appliquées.
La mise en scène, très efficace, avec un ton assez docu en caméra portée, nous entraîne nous aussi dans la dérive de ce mouvement.
En effet, il y a des bénéfices à l'autorité, la discipline, l'uniforme, le symbole, le leader charismatique.
La déviance est pourtant redoutable : L'autoritarisme, la contrainte, l'uniformité, l'icone, le dictateur.
Tout cela se met en place avec une simplicité enfantine.

Naturellement, le mouvement connait des opposants, mais que sont-ils ? ils ne font pas partie du groupe, comment leur parole pourrait-elle avoir une once d'intérêt ? comment pourraient-ils détenir la vérité ? L'Histoire est en marche, ce qui veulent peuvent prendre le train, les retardataires risquent de ne pas avoir de seconde chance.
C'est comme une ruche. L'identité de l'individu, c'est l'identité de la ruche.
D'ailleurs, comment ne psa adhérer ? Des jeunes normaux, qui se reconnaissent dans un idéal de vie, qui aiment s'amuser, n'est-ce pas ainsi que fonctionne toute société ? Le principe est alléchant, l'uniforme simple et décontracté, le logo sympa, le salut cohérent, les membres drainent une énergie vitale.
Vraiment, la frontière entre la communauté et le totalitarisme est mince, chaque jour nous en éprouvons la limite, chaque jour nous légitimons dans nos propres vies des actes qui, à une plus grande échelle, nous horrifieraient pûrement et simplement.
Du film en lui-même, que dire ?
La réalisation est brillante, ce côté caméra portée n'entrave pas la lisibilité des actions, les acteurs sont formidables, les jeunes comme les moins jeunes. La lumière pseudo-réaliste fonctionne à merveille, le son puissant et dynamique. Le montage laisse aux personnages le temps d'exister mais entraîne implacablement vers le dénouement. Une brillante adaptation d'un fait divers, loin des prétentions esthético-pompeuses d'un Gus van Sant, ce thriller social...
Ajout de note : Il est interessant de noter que le fait divers d'origine, qui a inspiré un livre, puis ce film, n'a pas eu lieu en Allemagne. Certaines mauvaises langues auraient pu prétendre qu'ils ont ça dans le sang, qu'on ne se refait pas, que c'est leur côté germanique.
Cette expérience a été menée aux Etats-Unis, en 1967, au début de la guerre de VietNam, à une époque où les jeunes tentaient de s'émanciper des règles jugées trop rigides de leurs aînés
Ce qui est encore plus impressionnant, c'est qu'en trois jours seulement le mouvement a pris forme et initiait ses premières dérives. En une petite semaine, certains élèves auraient donné leur vie pour la "cause" et manifestaient les premières ébauches d'une "corruption politisante" et une dévotion totale à leur leader /professeur, qui aurait pu exiger d'eux le meilleur comme le pire.